[…] Avec plusieurs grèves déclenchées en même temps et coordonnées syndicalement, avec des occupations d’entreprise, c’est un véritable mouvement de travailleurs sans papiers qui se lève et interpelle, non pas simplement tel ou tel patron, telle ou telle préfecture, mais le gouvernement et son ministre de l’Immigration, de l’Intégration et de l’Identité nationale. En fait, toute la société. […] En faisant grève massivement à partir de ce 15 avril 2008, les travailleurs sans papiers ont rejeté ce manteau du clandestin, que le patronat et l’État voulaient absolument qu’ils gardent comme une deuxième peau pour faire d’eux des boucs émissaires, si utiles en temps de crise. Leur grève a neutralisé le vieux discours éculé et nauséabond : « du travail pour les Français d’abord ». […]
Ce mouvement de grève a révélé toute l’étendue de l’hypocrisie du système. Il a suffi que ces travailleurs brandissent devant les caméras, feuilles de paie et déclarations d’impôts pour que l’opinion publique comprenne la nature profonde de ce mouvement et le soutienne. Autour de tous les piquets de grève se sont constitués de nombreux comités de soutien. […]
Il en a fallu du courage de la part de ces hommes et de ces femmes pour se lancer dans ce mouvement. Une fois le badge syndical sur la poitrine, face au patron, impossible de revenir en arrière. Ce courage, c’est aussi la marque de fabrique de cette « grande grève » des travailleurs sans papiers. Grève, nécessaire, obligatoire pour gagner non seulement ses papiers, mais aussi pour toute une dignité, dans cette société capitaliste où rien ne se donne mais où il faut tout arracher.